Logements sociaux : 1/3 des communes soumises à la loi SRU récalcitrantes
140 000 logements sociaux ont été construits entre 2011 et 2013 par les 1022 communes soumises à la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU). Un résultat bien au-delà de l’objectif fixé de 90 000. Mais, 330 communes ne remplissent pas leurs obligations.
Frédérique Vergne
Si on avait à noter le bilan de la loi SRU sur la période 2011-2013, on pourrait lui attribuer un C+, ou moyen +. En fait dans les résultats du bilan triennal provisoire de l’application de la loi SRU, dévoilé jeudi 19 février, par le ministère du Logement, il y a une bonne et une mauvaise nouvelle.
La bonne nouvelle tout d’abord est que les 1022 communes concernées par la loi SRU et n’atteignant donc pas le seuil minimal de 20% de logements sociaux (taux porté à 25% à partir de 2014 par la loi du 18 janvier 2013) ont réalisé 140 000 logements sociaux entre 2011 et 2013, soit 156% de l’objectif de 90 000 qui leur avait été fixé par l’Etat pour rattraper leur retard. « C’est donc que la loi SRU fonctionne et qu’elle a joué son rôle », explique le cabinet de Sylvia Pinel. Depuis sa création, les résultats sont plutôt encourageants puisqu’ils ne cessent de progresser : 87 000 logements construits entre 2002-2004 ; 95 000 entre 2005-2007 et 130 500 entre 2008-2010.
1/3 des communes hors la loi
La mauvaise nouvelle est que des disparités persistent. Le bilan provisoire (la version définitive sera publiée en avril dès que les 3 départements retardataires auront remis leurs données et après examen en commission nationale des recours déposés par certaines communes) montre que, parmi les 70 départements (sur les 73 concernés), 62 % des communes ont dépassé leurs objectifs, mais un tiers (environ 330) n’a pas atteint l’objectif triennal fixé. Parmi elles, 215 communes font l’objet d’un arrêté de carence de la part du préfet, qui exerce son droit de préemption et leur impose également des pénalités financières. La loi du 18 janvier 2013 qui vise à renforcer les obligations de la loi SRU permet en effet aux préfets de département de majorer le prélèvement jusqu’à ce qu’il atteigne 5 fois le prélèvement initial, prélèvement majoré qui ne peut toutefois pas excéder 7,5% des dépenses de fonctionnement d’une commune.
Des préfets tolérants
Force est de constater que le quintuplement de la pénalité, applicable dès le bilan 2011-2013, ne s’est pas généralisée. Sur les 330 communes qui n’ont pas atteint leur quota de logements sociaux, 115 ne sont pas sanctionnées et sur les 215 communes « carencées », seule une dizaine d’entre elle a eu la peine maximale. La moyenne du taux de majoration sur la période 2011-2013 étant de 1,7 fois.
Les préfets seraient-ils tolérants et pourquoi ? Sont-ils alors les mieux placés pour distribuer les sanctions ? La réponse se trouve en fait dans deux raisons. D’abord, la non rétroactivité de la loi qui ne permet le quintuplement de l’amende que sur la carence de la dernière année considérée. Puis, comme le rappelle l'entourage de la ministre du Logement, « la multiplication par 5 n’est pas le règle par défaut ». Le montant des pénalités se fait selon l'appréciation du préfet, laquelle peut varier, en fonction "des situations locales", par exemple si la mairie "a fait preuve de volonté", "se trouve proche de l'objectif mais a été confrontée à des problèmes de contentieux sur un permis de construire" ou encore s’il est avéré une décroissance démographique. Bref, c’est selon et ce libre-arbitre crée des différences de traitement entre communes. Au regard de ce constat, le ministère réfléchit à certaines pistes pour retirer cette responsabilité aux préfets.
Des consignes fermes aux préfets
En tout cas, ce n’est pas faute de messages du gouvernement adressées aux préfets. Sylvia Pinel, la ministre du Logement, leur a donné des consignes de fermeté, et a échangé avec eux toute l’année dernière pour faire respecter la loi, précise son entourage. Fin janvier, le ministre de la Ville Patrice Kanner avait parlé de "saisir des terrains disponibles" dans certaines communes ne respectant pas le quota de 25% de logements sociaux et "construire" des habitations pour assurer une plus grande mixité sociale. Et tout dernièrement, début février, le président de la République François Hollande a promis que la loi sur la construction de logements sociaux serait "strictement appliquée" et évoqué un renforcement des sanctions pour les élus ne respectant pas les quotas imposés par la loi. "Nous devons faire en sorte que la loi SRU soit strictement appliquée, que des communes ne puissent pas s'en dégager et s'il le faut les sanctions seront renforcées, le pouvoir des préfets sera lui-même conforté pour prendre les décisions en matière de construction de logements dans ces villes-là", avait-t-il affirmé lors de sa cinquième conférence de presse.
Autant de sujets qui devraient être évoqués à l’occasion du comité interministériel sur l’égalité et la citoyenneté prévu le 6 mars.
Bilan triennal provisoire de l'application de la loi SRU entre 2011 et 2013
Région | Nombre de communes soumises au bilan triennal 2011/2013 | Nombre de communes carencées à ce jour | Pourcentage de communes en règle |
Alsace | 37 | 11 | 71 % |
Aquitaine | 66 | 10 | 85% |
Auvergne | 15 | 0 | 100% |
Bourgogne | 12 | 0 | 100% |
Bretagne | 70 | 0 | 100% |
Centre | 24 | 2 | 92% |
Corse | 3 | 1 | 67% |
Haute Normandie | 8 | 1 | 88,5% |
Ile-de-France | 185 | 40 | 79% |
Languedoc-Roussillon | 82 | 33 | 60% |
Limousin | 11 | 0 | 100% |
Lorraine | 12 | 0 | 100% |
Midi Pyrénées | 55 | 3 | 95% |
Nord Pas-de-Calais | 48 | 5 | 90% |
PACA | 147 | 85 | 43% |
Pays de la Loire | 51 | 2 | 96% |
Picardie | 4 | 0 | 100% |
Poitou-Charentes | 34 | En attente pour 1 département | |
Rhône-Alpes | 118 | 22 | 82 % |
Mayotte | 1 | 0 | 100% |
Martinique | 20 | 0 | 100% |
Réunion | 19 | 0 | 100% |
Guadeloupe | NC | En attente de remontée du bilan | |
Guyane | NC | En attente de remontée du bilan | |
Total | 1022 | 215 | 79% |
Logements sociaux : 1/3 des communes soumises à la loi SRU récalcitrantes
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