Ma parole!

J’avais tout… et après?

Comment fait-on pour survivre à un épuisement professionnel, après avoir tout remis en question? Geneviève Pettersen raconte.

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Vous avez été nombreux et nombreuses à m’écrire à la suite de ma dernière chronique, J’avais tout. Vous vouliez connaître la suite, savoir comment je m’étais sortie de mon marasme et si on s’en remettait, de l’épuisement professionnel. J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous. Oui, on s’en remet. Mais ça prend du temps. Beaucoup de temps. Dans mon cas, ç’a pris deux ans. Rassurez-vous, je n’ai pas passé deux ans de ma vie à désespérer roulée en boule dans mon lit. Mais il m’aura fallu 24 longs mois pour retrouver mon énergie d’avant et cesser de me sentir totalement dépassée à la moindre contrariété.

Je vais être honnête avec vous, j’aurais pu prendre des antidépresseurs, mais je n’ai pas voulu. Je ne suis pas contre les pilules en général ni contre le Zoloft en particulier. C’est juste que je ne sentais pas que c’était impératif pour moi d’y avoir recours. Je vous ai dit que mon médecin m’a donné, à l’époque, une prescription d’anxiolytique. Quinze pour être plus précise. J’ai pris les quinze. Pas en même temps, rassurez-vous. Je me rappelle que j’étais très angoissée à l’idée d’avoir démissionné et que, le soir, quand mes filles étaient au lit, je faisais des crises de panique. J’avais chaud, je tremblais et j’avais peur de mourir. Bien entendu, tout ça se passait dans ma tête, mais mes quinze petites pilules blanches m’ont aidée à traverser cette tempête sans sombrer totalement, mettons.

J’ai consulté une psychologue, aussi. Et je dirais que c’est elle qui m’a aidée à y voir plus clair. Assise dans son bureau, avec ma boîte de Kleenex, j’ai réalisé plein d’affaires. J’ai compris que je faisais un métier que j’aimais pour les mauvaises raisons et que j’avais volontairement balayé pas mal d’affaires sous le tapis dans l’espoir de réussir à avancer dans la vie. C’est là que j’ai décidé de regarder mes bibittes en face et de les régler. Ça aussi, ça prend du temps. Et encore aujourd’hui, je ne sais même pas si j’y suis arrivée complètement. De toute façon, les bibittes se reproduisent à vitesse grand v et leur progéniture a sans doute déjà élu domicile dans un racoin de ma tête.

C’est cucul de dire ça, mais c’est le fait de faire enfin ce que j’aimais qui m’a «guérie». J’ai arrêté de me faire des accroires et je me suis avoué que ce dont j’avais envie pour vrai, c’était d’écrire. Plusieurs ont pensé, en lisant ma chronique, que j’étais devenue femme au foyer. Eh bien non. J’en serais incapable. J’adore mes enfants, mais j’avais envie de continuer à travailler. J’ai simplement aménagé mon travail pour qu’il soit en harmonie avec ma maternité. C’est difficile, mais ça se peut. Je n’aurais pas pu y arriver sans le soutien indéfectible de mon chum, par contre. Pendant tout le temps qu’a duré ma crise, il a été là et m’a encouragée à plonger. Il s’est occupé de tout et il m’a permis d’aménager un espace dans ma vie pour l’écriture. S’il n’avait pas été là, s’il ne m’avait pas convaincue qu’écrire était ce que je pouvais faire de mieux, je ne sais pas si mon histoire se serait aussi bien terminée. C’est important de dire qu’on ne se sort pas de la dépression toute seule. On a besoin de quelqu’un pour nous encourager, nous prendre par la main et nous aider à refaire surface. Parce que seule, on coule.

 

Pour écrire à Geneviève Pettersen: genevieve.pettersen@rci.rogers.com

Pour réagir sur Twitter: @genpettersen

Geneviève Pettersen est l’auteure de La déesse des mouches à feu (Le Quartanier)

 

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