Pour la première fois depuis 1935, la cathédrale de Chartres n’accueillera pas, cette année, l’habituelle cohorte des étudiants d’Île-de-France aux membres engourdis par leur marche d’une quarantaine de kilomètres à travers la Beauce, souvent depuis Rambouillet.

Les évêques franciliens ont cette fois invité les 18-30 ans de leurs diocèses (étudiants et jeunes professionnels) à une « nuit blanche » à Montmartre le vendredi 28 avril au soir : les groupes afflueront à pied depuis leurs paroisses puis participeront à des enseignements, à une messe et à des prières au Sacré-Cœur jusqu’au lendemain matin.

Un événement lancé en 1935

« Ce n’est pas la fin du pèlerinage des étudiants vers Chartres, assure le P. Jean-Baptiste Arnaud, responsable de l’organisation de cette “nuit blanche”, mais il ne se tiendra peut-être plus tous les ans. » Le fait que le pèlerinage du week-end des Rameaux dure deux jours et n’ait pas lieu en région parisienne contribuait selon ce prêtre à décourager certains groupes.

Ils n’étaient plus qu’un millier d’étudiants à prendre la route de Chartres ces dernières années, à la suite de Charles Péguy qui s’y était rendu à pied en 1912 et 1913. Cet événement annuel avait été lancé en 1935 par une poignée d’étudiants de la Sorbonne, admirateurs de l’écrivain converti à la foi catholique. Le pèlerinage avait connu son apogée dans les années 1960, regroupant jusqu’à 12 000 étudiants autour de leur aumônier de l’époque : l’abbé Jean-Marie Lustiger, futur archevêque de Paris.

Mais après Mai 68, la participation à ce rendez-vous s’est inexorablement érodée. Pour Gilles Fresson, l’intendant « attristé » de la cathédrale de Chartres, la formule n’a pas été suffisamment renouvelée. « Il ne faut pas se contenter de perpétuer une tradition, estime-t-il. L’invitation des évêques devrait être plus claire. Que veulent-ils : que ces jeunes vivent à Chartres ? » Cet historien trouve toutefois « incompréhensible » que cet événement ne soit pas plus fédérateur, à l’heure où les pèlerinages ont le vent en poupe.

Ce pèlerinage étudiant a marqué des générations de chrétiens et constituait un moment fort au sanctuaire marial de Chartres. Celui-ci accueille aussi le pèlerinage de Notre-Dame de Chrétienté, qui attire à la Pentecôte 8 000 personnes de sensibilité traditionaliste. À Chartres, Gilles Fresson veut croire que le pèlerinage des étudiants n’est que « suspendu » et qu’il aura bientôt à nouveau lieu.