
Raccorder la France entière au très haut débit d’ici à 2022. Une ambition qui semblait démesurée au départ mais qui pourrait finalement bien se concrétiser à temps, tant le gouvernement y tient.
Jeudi 16 juillet se tenait justement la conférence annuelle du plan France très haut débit, un événement visant à faire le point sur l’avancement du projet et réunissant les principaux acteurs du secteur : la mission très haut débit, mais aussi l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) et les quatre opérateurs hexagonaux. Les patrons d’Orange (Stéphane Richard), Numericable-SFR (Eric Denoyer), Bouygues Telecom (Olivier Roussat) et Iliad (Maxime Lombardini), la maison mère de Free, ont d’ailleurs rencontré dans l’après-midi Emmanuel Macron, le ministre de l’économie, pour aborder, entre autres sujets, cette question.
Objectif atteint à 44 %
Lancé au printemps 2013, le plan France très haut débit vise à raccorder ménages et entreprises à cette technologie en dix ans grâce à une action coordonnée des opérateurs télécoms, de l’Etat et des collectivités. Pour y arriver, ces trois entités entendent consentir en tout 20 milliards d’euros d’investissement – dont 3 milliards à la charge du gouvernement.
De fait, aujourd’hui, deux ans après le lancement du chantier, 44,3 % de l’objectif a été atteint. Environ 17 millions de locaux (logements, entreprises et sites publics) ont été raccordés à ce jour à un réseau de cuivre très haut débit (VDSL2), câble modernisé ou encore fibre optique.
Des technologies qui permettent des débits supérieurs à 30 mégaoctets par seconde, en vue de répondre à la croissance exponentielle des volumes de données (vidéos, photos, requêtes et informations) qui passent dans les réseaux fixes. « Ce plan n’a pas pour but de rattraper mais de prendre de l’avance sur les autres pays », insiste Antoine Darodes, président de la mission très haut débit.
Contrairement au mobile où il s’agit d’installer des antennes qui rayonnent sur un certain périmètre, l’Internet fixe à très haut débit nécessite de tirer des câbles de cuivre ou de fibre optique jusque dans l’immeuble ou le pavillon à raccorder. Puis de lui faire remonter la cage d’escalier. « C’est un programme de déploiement d’infrastructures lourdes. Quand on y réfléchit, il n’y en a pas de pareil en ce moment en France », indique Pierre Louette, directeur général adjoint d’Orange.
Le déploiement est par conséquent coûteux, mais aussi compliqué et les opérateurs entament d’abord la couverture des zones très denses puis moyennement denses. Laissant aux collectivités locales moins peuplées le soin de construire leur propre infrastructure. Puis de la louer à Orange, Numericable-SFR, Bouygues Telecom ou Free. Il s’agit alors de réseaux dits « d’initiative publique ».
Les coûts sont tellement élevés que les opérateurs sont contraints de réaliser des co-investissements, se branchant les uns au réseau des autres quand celui-ci est déployé. Mais pas question d’y renoncer. L’opérateur historique, Orange, est par exemple engagé dans des accords de cofinancement avec Iliad, la maison mère de Free, et avec Numericable-SFR selon les communes.
Attirer les abonnés
Pour eux, l’enjeu est déterminant. La bataille qui faisait rage dans le mobile s’est en effet aujourd’hui déplacée sur le très haut débit fixe. Les prix étant globalement stabilisés dans le premier, les opérateurs cherchent en effet aujourd’hui à attirer les abonnés en leur proposant des offres « quadruple play » (mobile, fixe, Internet et télévision) innovantes. Or, sur le fixe, ce sont les promesses de débit qui attirent le chaland. Une fois une telle offre souscrite, il est très difficile de passer à la concurrence. Le très haut débit est, en outre, facturé un peu plus cher, ce qui permet de regagner quelques points de marge en remontant le revenu moyen par abonné. « On voit, dans les zones très denses, que là où la fibre est présente, nous regagnons des parts de marché », remarque Pierre Louette.
« Celui qui continue à faire de l’ADSL et n’a pas compris qu’il faut investir massivement dans la fibre n’a pas d’avenir », abonde un concurrent.
Le très haut débit est en effet plus rentable car il permet de vendre une multitude de services annexes comme les jeux vidéo en ligne ou encore la vidéo à la demande. Orange a par exemple remarqué que les consommateurs qui étaient passés à la fibre optique dépensaient en moyenne sept fois plus en vidéo à la demande (directement sur le catalogue fourni avec la box de l’opérateur) que les autres.
Mais encore faut-il convaincre les consommateurs de changer d’offre. « C’est là dessus que la bataille va être la plus rude, il va falloir les convaincre de changer d’abonnement et d’opérateur », conclut un analyste.
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