Divers - Un docteur est pour un «dopage alternatif»
Par Renaud BREBAN le 05/07/2014 à 20:24
"La lutte contre le dopage a échoué : il est temps d'autoriser le dopage dans le sport professionnel". Voilà ce que vient de déclarer le professeur Julian Savulescu auprès de nos confrères de CyclingTips. Dans le peloton moderne, tout le monde s'accorde à dire que les coureurs sont plus propres qu'il y a une dizaine d'année, mais la réalité est qu'il "existera toujours du dopage, c'est "humain". "La lutte contre le dopage est un échec. Le taux de réussite est très faible. Lorsque le test pour détecter l'EPO a été introduit dans la lutte contre le dopage (début des années 2000, ndlr), on avait tous dit que cela éradiquera le dopage, mais au cours de ces 12 dernières années, on a bien vu que cela ne s'est pas forcément améliorer et que le système reste le même. En tout cas, il n'est pas possible d'assimiler un "test négatif" à une absence de dopage. Si vous utilisez des petites quatités de substances physiologiques, c'est pratiquement impossible à détecter, même avec un passeport biologique et un suivi à long terme."
Donc, Savulescu propose une alternative : un système anti-dopage alternatif : celui qui autorise la prise de substances améliorant la performance tandis que le dopage lourd et le dopage "mental" restent interdits. Il serait prêt à autoriser tous les produits dopants que l'on retrouve à l'état naturel dans le corps tel que l'EPO. "Je propose qu'on mesure l'hématocrite et qu'on se fixe une limite à ne pas dépasser. Il est prêt aussi à autoriser les hormones de croissance. Par contre, stop aux "analgésiques et anti-inflammatoire". Car tous ces produits, qu'il décrit comme une "dopage mental", permet aux coureurs de courir toujours au plus haut niveau malgré des blessures importantes. "L'esprit sportif, c'est faire face à la douleur. Donc empêcher de souffrir, ça devrait être interdit."
Il serait même prêt à interdire le café : "Aujourd'hui, tous les coureurs prennent de la caféïne. Cela ne choque personne, mais jusqu'en 2004, cela était interdit car c'est prouvé : ça améliore la performance physique et permet surtout de repousser la fatigue. Cet exemple montre que le problème ne vient pas de l'amélioration de la performance en soi."
L'argument que l'on ressort à l'encontre de ce docteur est souvent le même : si on n'arrive pas à attraper tous les tricheurs, cela ne veut pas obligatoirement dire qu'il faut baisser les bras. Savulescu répond : "Oui, il y aura toujours des gens qui trichent, qu'importe le réglement. On n'arrivera jamais à éliminer toute forme d'activité humaine pouvant corrompre. Vont-ils essayer de contourner les règles pour avoir un avantage ? Oui, certainement. La question est de savoir comment vous réduisez le pourcentage de tricheur." Autre argument : Quel message donne-t-on aux enfants qui veulent se lancer dans le vélo ? "On devra faire passer le message que chacun doit respecter son corps. De plus, il faudrait qu'on interdit ces produits aux mineurs."
En tout cas, le docteur sait qu'il est minoritaire dans ce débat. Mais il espère que chaque personne puisse réfléchir à ce sujet : "J'ai une vision socratique, celle d'amener les gens à penser par eux-mêmes. Qu'ils identifient les mauvais argument. Je ne suis pas un défenseur du dopage, mais j'essaye de fournir des arguments pour avancer. Désormais, ce sont aux instances sportives de faire la démarche du changement. En tout cas, les gens qui sont les plus virulents à mon encontre sont les plus fanatiques du sport et n'arrive pas à réfléchir de manière calme et posée. C'est un peu comme le débat sur l'euthanasie."