Philippe Pascot, le "justicier" de l'Essonne

Cet ancien collaborateur de Valls à Évry s'est spécialisé dans la dénonciation des crapuleries politiques. Portrait d'un zébulon haut en couleur.

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Philippe Pascot au micro de Jean-Jacques Bourdin, sur RMC.
Philippe Pascot au micro de Jean-Jacques Bourdin, sur RMC. © Capture d'écran / RMC

Temps de lecture : 7 min

Le 7 mars 2016, dans les coulisses de chez Bourdin, Philippe Pascot entame la discussion avec Mélenchon en pleine séance de maquillage.

- Salut, Jean­-Luc, tu te souviens de moi ?

- Non...

- Tu ne voulais pas t'asseoir à côté de moi au conseil régional parce que je t'ai piqué des voix aux sénatoriales quand je faisais campagne avec le PRG !

- Ah oui, tu es le seul mec du Parti radical qui me résistait dans l'Essonne.

- Bon, Jean­-Luc, il faut que j'y aille. N'oublie pas de lire mon livre, tu es dedans !”

De fait, le patron du Parti de gauche ne sera pas déçu. On lit page 305 de Délit d'élus qu'il a été “admonesté” par la justice en 2007 pour avoir utilisé les voitures et chauffeurs du conseil général de l'Essonne "sans droit ni titre". Une broutille par rapport aux magouilles que Pascot dénonce sans relâche, quelle que soit l'étiquette de l'élu.

Philippe Pascot, c'est le justicier de l'Essonne, la terreur des magouilleurs et tripatouilleurs. Il est pourtant lui-même ancien patron du PRG, et ancien conseiller régional de l'Essonne, mais, à 61 ans, il consacre son énergie inépuisable et sa patience illimitée à compiler et dénoncer les mauvais comportements de ses anciens collègues, y compris au-delà de son département. Ce redresseur de torts y sévit souvent sur les plateaux télé, car il est “un bon client” pour les médias. Provocateur, excentrique, un poil caractériel, et jamais consensuel, il prépare ses interviews avec minutie. Après avoir écrit Délit d'élus en 2014, il a publié Du goudron et des plumes, deuxième tome de son bottin mondain des politiques condamnés ou mis en examen. Deux livres "élaborés avec les moyens du bord, à partir de faits avérés, jugés ou en passe de l'être et relayés par les médias". Jamais il n'a été attaqué en justice.

Gros bonnets épinglés

S'il épingle les gros bonnets, il n'épargne pas non plus les élus moins connus. On apprend ainsi que le maire adjoint FN de Toulon “embauchait des femmes en grande précarité, leur trouvait un logement pour mieux les violer ou les soumettre à ses désirs sexuels pervers, et qu'il a déclaré à la presse être le "le Clinton français" avant sa mise en examen. Que le maire PS de Fontenay-­aux-­Roses a crié au “complot politique” à son procès pour harcèlement contre sa directrice de communication qui s'est jetée du septième étage (il a écopé de six mois de prison avec sursis pour harcèlement moral, 8 000 euros d'amende et 15 000 euros de dommages et intérêts). Ou encore que l'épicerie d'un élu de Rennes servait de plaque tournante à un trafic de drogue...

Mais son best­-seller, c'est Pilleurs d'État. Vendu à 80 000 exemplaires, l'ouvrage écrit en 2015 dissèque, exemples à l'appui, les combines bien huilées et les avantages “immoraux ou illégaux” des élus français : indemnités gonflées, déclarations d'intérêts bidonnées, absentéisme répété, emplois fictifs, gratuité des transports aériens pour les femmes et les enfants de ministres... Charon, Châtel, Copé, Raffarin, Ayrault, tous en prennent pour leur grade. Populiste, Pascot ? “Je ne dis pas que les élus sont tous pourris. Les pourris sont même minoritaires. Pour autant, ceux qui sont vertueux sont souvent complices par leur silence ou leur vote de connivence aveugle.”

Pascot est dans l'air du temps si orageux. Il couche sur papier les raisons de la colère des citoyens à l'égard de leurs représentants, qui parfois éclate en tornades brutales. Outre ses bouquins, ses vidéos sur Internet cumulent plusieurs millions de vues. Il sait de quoi il parle. Depuis sa petite ville de Bondoufle, dans l'Essonne, il a vu grandir nombre de ténors de la politique. Outre Mélenchon, Nicolas Dupont­-Aignan, Serge Dassault, Nathalie Kosciusko-Morizet, Julien Dray, ou encore Manuel Valls dont il fut adjoint à la culture de 2001 à 2010 lorsque celui-ci était maire d'Évry, y ont fait leurs premiers pas politiques.

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Commentaires (28)

  • Le sanglier de Génolhac

    "depuis quatre ans et demi" J'ai acheté* mon premier élu (un conseiller général socialiste du Gard) en... 1978. Le premier d'une longue, trés longue, trés trés longue série. Et relisez, puisqu'on parle de Jean Montaldo, son numéro spécial du Crapouillot de 1970 "les scandales de la Vème république". Et Stavisky, et le conseiller Barrême, et le gendre de Jules Grévy, là on est carrément un siècle en arrière ! Les socialistes sont certes corrompus, mais ils n'ont ni le monopole des faits ni le bénéfice de l'ancienneté.
    * : 20. 000 francs (francs) en espèces. Mais "pas pour lui, pour le parti". Il serait captivant d'aller voir la comptabilité du P. S gardois en 1978 et de vérifier !

  • irene 27

    Il ne sera jamais attaqué car il écrit des vérités, certaines légales mais très choquantes, d'autres des "vraies vérités" que personne n'ose trop mettre sur le devant de la scène ! Relire "Mitterrand et les quarante voleurs" de Montaldot, il l'a dit lui-même : je ne suis jamais attaqué je n'écris que des choses parfaitement vérifiables ! Mais c'est vrai aussi que c'est vain car les magistrats n'oseraient jamais entamer une procédure. Ils préfèrent faire le mur des cons... Ils craindraient pour leurs postes, là en socialie, ils sont bien protégés... Quant aux autres ils sont coupables par lâcheté... Et comme l'écrit un internaute, les électeurs aussi qui savent et qui remettent en selle ceux qui sont "en délicatesse" avec la légalité.

  • henriette

    Ce livre devrait être offert GRATUITEMENT a tous les electeurs