Un ancien ministre a été cité à la requête du
MRAP devant le tribunal correctionnel sous la prévention d’injures
publiques envers un groupe de personnes à raison de leur origine,
pour avoir, lors de l’université d’été du parti UMP, le 5 septembre
2009 à Seignosse (Landes), tenu les propos suivants, enregistrés et
diffusés par les médias, en se référant à l’origine arabe prêtée à
l’un de ses interlocuteurs :
« Ah mais ça ne va pas du tout, alors, il ne correspond pas du tout
au prototype alors. C’est pas du tout ça » ;
« Il en faut toujours un. Quand il y en a un ça va. C’est quand il y
en a beaucoup qu’il y a des problèmes ».
L’affaire fut assez médiatisée pour qu’on s’en
souvienne.
Le tribunal relaxe le prévenu pour le premier propos et requalifie
le second propos en contravention d’injure raciale non publique,
condamnant le prévenu de ce chef.
Le ministère public et la partie civile font
appel.
La cour d’appel de Paris dit non établi
l’élément de publicité de l’infraction.
En effet, si le second propos revêt un
caractère injurieux à l’égard d’un groupe de personnes à raison de
leur origine, l’arrêt relève que la réunion au cours de laquelle
les paroles litigieuses ont été prononcées était certes
ouverte à la presse, mais la présence de cette
dernière, à elle seule, n’enlevait pas à cette manifestation,
réservée aux militants de l’UMP, son caractère privé, et
d’ailleurs, les images traduisent le « caractère quasi familial » de
la rencontre, rien ne venant attester la présence de tiers
étrangers à la communauté d’intérêts constituée par les membres de
ce groupe de personnes liées par des aspirations communes.
Les juges ajoutent que le prévenu, qui ne voit
pas l’objectif de la caméra, s’exprime sur le ton de la confidence,
et que son attitude démontre qu’il n’entend pas s’adresser au-delà
du cercle restreint formé par les militants qui l’entourent, au
point qu’il a été nécessaire de recourir, avant diffusion, au
procédé du sous-titrage pour rendre la conversation
compréhensible.
Ils en déduisent que, dès lors que la
contravention d’injure raciale non publique ne figure pas dans
l’énumération des infractions délictuelles pour lesquelles les
associations habilitées peuvent exercer les droits de la partie
civile, figurant à l’article 48-1 de la loi de 1881, le MRAP est
irrecevable en sa constitution de partie civile, et que le prévenu
doit être mis hors de cause.
Le pourvoi est rejeté par la chambre
criminelle de la Cour de cassation qui juge que la cour d’appel a
justifié sa décision.
En effet, d’une part, un propos injurieux, même tenu dans une
réunion ou un lieu publics, ne constitue le délit d’injure que s’il
a été « proféré », au sens de l’article 23 de la loi sur la presse,
c’est-à-dire tenu à haute voix dans des circonstances traduisant
une volonté de le rendre public, d’autre part, le droit d’agir
reconnu aux associations habilitées par l’article 48 -1 de la même
loi n’est prévu que pour les délits limitativement énumérés par ce
texte.
Arrêt