On a séquestré ma fille... à l'école

"Comme tous les mercredis, je me rends à l'école de ma fille Louise à 14h30 afin de la récupérer après la sieste. Un membre du personnel vient à ma rencontre lorsque je suis devant l'école. Je précise, qu'il est sorti par une porte qui était grande ouverte lors de mon arrivée..." Opinion.

Contribution externe
On a séquestré ma fille... à l'école
©Belga

Une opinion (ou plutôt humeur) de Walter P., enseignant et jeune papa

Mes petits collègues enseignants,

Par ce mail, je souhaite vous faire part de ma mésaventure de cet après-midi. Comme tous les mercredis, je me rends à l'école de ma fille Louise à 14h30 afin de la récupérer après la sieste.
Un membre du personnel vient à ma rencontre lorsque je suis devant l'école. Je précise, qu'il est sorti par une porte qui était grande ouverte lors de mon arrivée, j'aurais pu donc très bien pénétrer dans l'établissement sans difficulté (ou une personne moins bien intentionnée).

Il me demande la raison de ma présence, je lui explique donc que je viens comme à l'habitude récupérer Louise ainsi qu'une amie à elle.
Il me signale que je n'ai pas le droit de venir la chercher avant 16h, soit 1h30 plus tard. Cette information n'a aucunement été signalée à la maman de Louise le matin lorsqu'elle a du la déposer devant l'entrée.
Je fais remarquer que je ne suis pas au courant de cette information, que ma fille n'a que 3 ans, que nous l’avons quittée au matin en lui expliquant que nous passerions après le "petit dodo".
Ce brave homme passe un coup de téléphone, décline mon identité, on lui confirme que je ne peux pas récupérer ma fille. J'insiste, je suis le parent, le tuteur légal. Qui possède le droit de ne pas me rendre mon enfant ?
Rien n'y fait, j'excuse ce monsieur, il applique des directives communales. La boule au vente, le cœur serré, la gorge nouée, je me résous à laisser ma fille pour qui le temps va sembler bien long.
Vient ensuite la colère, qu'est ce que c'est que cette mesure abusive?!

Je contacte la commune, j'ai en ligne le service de l'éducation.

Vous devinez aisément la suite, vu les circonstances exceptionnelles, le bourgmestre a décidé que l'établissement est fermé aux parents, il y a des heures pour venir les chercher 13h30, 16h00 et 18h00. Faut pas louper le rendez-vous ... fallait le savoir surtout. Seule possibilité de recours, envoyer une plainte par écrit à la commune.
Je passe en mode enragé... Moi aussi je suis enseignant, avec mon équipe nous avons également appliqué des mesures sécuritaires: dans notre école aussi, l'accès aux parents est limité. Mais de là à refuser à un parent de récupérer son enfant, il y a un sacré pas.

Ni une, ni deux, je vais au commissariat afin d'expliquer les faits et que je souhaite introduire une plainte contre la commune.
Le personnel, très à l'écoute, surpris, pas du tout au courant de cette mesure comme tout un tas d'autres validées dans l'urgence, apparemment.

Vient donc, vu mon insistance, le commissaire.

Monsieur, vous souhaitez déposer plainte pour quel motif ? Séquestration d'enfant Monsieur. Jusqu’à preuve du contraire, sa maman et moi sommes les seuls tuteurs légaux, les seuls à prendre des décisions en ce qui concerne son bien et sa sécurité. Je n'ai jamais donné mon accord pour que l'école s’octroie le droit via la commune de conserver ma fille entre ses murs et sans mon consentement.
Monsieur le commissaire, si on prive ma fille de sa liberté et ses parents de décisions la concernant, je ne sais pas vous, mais moi j'appelle ça de la séquestration d'enfants.
Réponse du commissaire, "vous êtes ridicule". En tant qu'enseignant vous devriez comprendre ces mesures, vous pourriez être content qu'on s'occupe de vos enfants pendant la journée... blabla blabla (véridique, c'est moi qui suis en tort). Il ajoute même, de toute façon Monsieur, vous êtes connu ici, avec vos mails... Je lui fais comprendre que je ne sais pas de quoi il s'agit et qu'il fait erreur sur la personne.

Je tente malgré tout un dialogue, il reste sourd, il reste borné. Je me fais sortir gentiment sans avoir été ni écouté, ni compris par ce chef de corps.
J'ajoute que dans la conversation, il m'a tout de même dit que selon lui, les garderies n'auraient pas du être organisées et que les écoles auraient du rester fermées.

Ma question: si effectivement il y a un danger si imminent que ça, un danger qui pousse les communes à priver les enfants de leur liberté et leurs parents de leurs droits fondamentaux, c'est que les écoles devraient restées fermées. Qu'ils sont bel et bien plus en sécurité à la maison, que dans un établissement scolaire. Je ne peux arriver qu'à cette conclusion.

Ma deuxième conclusion serait la suivante, puisqu'il en est ainsi, tant que le niveau d'alerte sera de 4, je garde ma fille à la maison et je ne me rends plus à mon lieu de travail. A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Et si hypocrisie il faut, je trouverai un médecin compétant qui couvrira mes absences.

Mes petits collègues, je vous kiffe... presque tous ;-) mais je kiffe encore bien plus ma fille et dans ces conditions, je suis désolé mais peut-être que ces prochains jours vous allez devoir faire sans moi.

Walter P.


La photo de l'article est une illustration prétexte sans lien avec l'école dont il est question dans l'opinion.


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