Yahya, réfugié syrien à Saint-Ouen : "On a frappé à toutes les portes. En vain"

Yahya, réfugié syrien à Saint-Ouen : "On a frappé à toutes les portes. En vain"
Réfugiés syriens au square Édouard-Vaillant de Saint-Ouen, le 22 avril 2014. (CYRIL BONNET/LE NOUVEL OBSERVATEUR)

Ils sont une centaine de réfugiés à avoir fui la Syrie et à s'être installés avec famille et enfants dans un square de région parisienne. Portraits.

Par Le Nouvel Obs
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Ils sont une centaine. Des réfugiés syriens, accompagnés de leurs enfants, parfois très jeunes, se sont installés dans le square Edouard-Vaillant à Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis depuis plusieurs semaines. Ils passent la journée sur la pelouse.

La nuit tombée, ils dorment à la mosquée, ou à l'abri d'une voiture. Parfois dans un hôtel Formule 1, grâce aux dons des associations. Les voisins et les associations leur distribuent des couvertures, de la nourriture et quelques billets.

Mardi 22 avril, malgré la demande d’Europe Ecologie-Les Verts de"réquisitionner un lieu d'accueil d'urgence", aucune solution d’hébergement n’avait encore été trouvée.

Les familles, qui ont fui le régime de Bachar Al-Assad, ont parfois traversé une demi-douzaine de pays avant d'arriver en France. Tous espèrent pouvoir y rester. Portraits. 

Assad, 20 ans, originaire de Lattaquié

 

"Je suis en France depuis trois mois, avec ma mère et mes trois sœurs de 22, 18 et 15 ans. On dort à l’hôtel place de Clichy, et parfois ici, dans le parc quand on n’a pas d’argent.

Mon père est resté en Syrie avec mon frère. Nous on a quitté la Syrie en octobre 2012, on est passé par le Liban, la Turquie, la Grèce, l’Italie. Je veux rester en France, pour pouvoir aller à l’école, et mieux apprendre le français."

Rana, 24 ans, originaire d’Idlib, enceinte de cinq mois et demi 

"Avant de venir ici, on est resté deux mois à Melilla. On n’avait rien, aucun endroit où dormir. On campait sur la Plaza de España avec d’autres familles syriennes. Finalement, on a réussi à passer la frontière grâce à des passeurs.

Ensuite on a traversé toute l’Espagne en train pendant 23 heures. On n’a pas voulu rester en Espagne, on préférait venir directement à Paris. Surtout qu’en Syrie, mon mari était professeur de français."

Mohamed, 23 ans, originaire de Homs

"J’ai appris à parler français en Syrie. Là-bas, on apprend à parler français à l’école ! Avant d’arriver ici, il y a quatre mois, j’étais au Liban, à la frontière [Homs n’est qu’à quelques kilomètres de la frontière entre la Syrie et le Liban].

Depuis qu’on est ici, des gens viennent nous aider, nous apportent  à manger, nous donnent de l’argent, presque tous les jours. Maintenant, je voudrais juste trouver une maison pour mes parents, ma femme et mon fils de 3 ans."

Yahya, 44 ans, originaire de Homs

"J’ai quitté la Syrie il y a trois ans avec ma femme et mes quatre enfants. Avant, j’étais prothésiste dentaire. Je connais bien la France, je suis déjà venu plusieurs fois, pour m’acheter du matériel médical.

C’est censé être un pays accueillant, mais là, il ne se passe rien. On a frappé à toutes les portes, et on n’a toujours pas de solution, alors qu’il y a des blessés, des femmes enceintes, des bébés…  Si la France ne veut pas de nous, qu’elle le dise clairement ! On est fatigué de toute cette hypocrisie."

Kasim, 24 ans et Rokeya, 22 ans, originaires de Homs

"Je suis là depuis seulement deux semaines, et ma femme depuis trois mois. Elle, elle est venue avec un visa, parce qu’elle a de la famille en Italie. Moi je l’ai rejoint, en passant par l’Espagne, via Melilla.

On aurait pu rester en Italie, mais on n’a pas voulu, on préférait venir ici, en France, avec notre fille. Elle a quatre ans."

Texte : Juliette Deborde 

Photos : Cyril Bonnet

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