Beaux et heureux

Encore une fois, ma truculente patronne m’a investie d’une mission divine. C’est que mon journal, vous le savez, aime ça faire des sondages. La dernière fois, il vous a demandé si vous étiez heureux et ce qui nuisait à votre bonheur. Cette fois-ci, il voulait savoir si vous vous trouviez beaux. Je tourne les coins ronds un peu, mais c’est à peu près ça. J’avoue que les résultats de cette enquête ne m’ont pas surprise pour deux cennes. Non, en grande majorité, vous ne vous trouvez pas très jolis. Et, comme pour retourner le fer dans la plaie, vous avez une fâcheuse tendance à trouver votre mari, votre meilleure amie, votre cousine de la fesse droite ou le livreur de pizza plus beaux que vous. On dirait bien que les jeunes hommes et femmes modernes manquent d’estime de soi. Mais ça, on le savait déjà.

Une autre affaire que le sondage vous fait dire, c’est que vous vous trouviez plus attirante il y a 10 ans. Par exemple, ça veut dire qu’une femme de 35 ans trouve toujours qu’elle était à l’apogée de sa beauté à 25 ans tandis que la femme de 45 caressera avec nostalgie le souvenir de son corps à la mi-trentaine. En clair, vous vivez dans le passé. Et j’avoue adopter la même attitude quand, devant des photos de moi à 22 ans, je songe à me défenestrer. J’exagère un peu.

Je le sais, les résultats du sondage sont un peu déprimants. Par contre, j’ai été tout égaillée lorsque je me suis rendu compte que plus vous êtes heureux, plus vous vous sentez beaux. Vous nous avez confié que pour vous, la beauté est plus une question d’attitude que d’esthétisme. Tout n’est pas perdu, donc. Ça veut dire que le petit geek à lunettes du bureau a peut-être une chance de vous séduire s’il vous impressionne avec ses traits d’esprit et son assurance. De toute façon, entre vous et moi, tout le monde le sait que sous chaque geek se cache un véritable dieu grec. Mais je m’égare.

Ce que je veux vous dire, à la lueur de ce très éclairant sondage, c’est qu’il faut travailler sur notre estime personnelle. Et pour nous aider à mener à bien ce défi, je nous ai dressé une liste des choses qu’il faudrait arrêter de faire si on veut y parvenir.

• Cesser de se regarder dans le miroir plein pied en se pinçant le mou de bedaine.

• Arrêter de penser que la cellulite est la pire des calamités. On va se dire les vraies affaires, même Britney Spears en a. Bon, ce n’est peut-être pas le meilleur exemple, mais vous comprenez ce que je veux dire.

• Faire mourir l’idée selon laquelle beauté rime automatiquement avec minceur et jeunesse. Si ça se pouvait, je demanderais aux designers graphiques de La Presse+ de faire luminer cette phrase dans le noir. Parce que c’est peut-être la conception de la beauté qui nous pourrit le plus l’existence. Ça se peut, être belle passé 40 ans, ok ? On peut aussi être magnifique si on pèse plus de 125 lb. Les femmes ne sont pas obligées de se botoxer, de s’affamer et de s’entraîner 25 heures par semaine pour ressembler à Penélope Cruz ou à Gisele Bündchen. Parce que je ne sais pas pour vous, mais moi, mes modèles de beauté sont de vraies femmes de toutes les formes et de tous les âges. Je pense entre autres à Louise Latraverse, à Caroline Allard, à Katherine Levac, à Claudia Larochelle, à Marie Plourde et à la sublime Marie-Thérèse Fortin pour ne pas les nommer. Toutes des femmes magnifiques. Ce conseil s’applique aussi à vous, messieurs. Pas besoin de ressembler à Bradley Cooper pour attirer notre regard.

• Dire adieu aux comparaisons. Arrêtons de penser que les trois quarts de la planète ont été plus gâtés par la nature que nous. De toute façon, on pourra toujours se comparer à pire ou à mieux que ça. On ne peut pas gagner à ce jeu-là.

• Manger mieux et faire plus de sport non pas pour être mince, mais pour être plus en santé et mieux dans notre corps. D’ailleurs, saviez-vous que les patates, c’est plein de vitamines ?

Si on fait tout ça, on devrait arriver à se sentir moins moches et on sera heureux, donc plus beaux. Vous voyez, j’ai pensé à tout. Ne me remerciez pas.