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Exclusif: nous avons pénétré dans la ferme des mille vaches (VIDÉO)

Et les portes s’ouvrent, celles de la plus grande ferme de France à Ducrat, près d’Abbeville. Derrière le projet « 1 000 vaches » campe le procès de l’industrialisation de l’agriculture et la défense de la paysannerie traditionnelle. Ce que nous avons vu pose l’enjeu du lait le plus agro-industriel du pays. Une première.

Temps de lecture: 3 min

Vidéo Baziz Chibane - La Voix du Nord

« La première vache est entrée toute seule sur le manège de traite, sans aucun stress. J’en ai pleuré, après tout ce travail et toutes ces histoires… ». Michel Welter dirige aujourd’hui le projet agricole le plus contesté de France, celui des 1000 vaches, né dans l’esprit de Michel Ramery, capitaine d’industrie du bâtiment dans le Nord, dont le père était fermier à Erquinghem-Lys, près de Lille. Un dirigeant qui a dû se battre contre une opposition de trois ans, résolue à faire obstacle à cette industrialisation du lait, encore inédite en France, le pays des verts pâturages et des petites étables de la ruralité profonde.

Et le débat fait rage. Le premier litre de lait est sorti de la « ferme-usine » dans la nuit du 15 septembre, encore avant le petit jour et sous haute surveillance policière. Un lait qui faillit bouillir ! Michel Ramery était présent à la première traite. Ils étaient une poignée à voir avec lui les 133 vaches faire leur travail derrière la toute première, 133 vaches venues des élevages pilotés dans le secteur d’Abbeville par les neuf associés de la société civile Lait-pi-carde, dont deux fermes appartenant à Michel Ramery. Le bilan, déjà ? Trois animaux de perdus pendant le transport, beaucoup de stress et au final un acte fondateur d’un élevage laitier qui passe à l’ère industrielle contre les préconisations de la nouvelle politique agricole du ministre de l’agriculture, grand écouteur de l’opinion publique…

Alors quoi ? Le changement de dimension fut vécu dans la presque stricte intimité, les opposants étant confinés dehors par une escorte de CRS. Une heure aura suffi pour traire les 133 premières vaches, elles sont environ 400 aujourd’hui, la ferme étant configurée – restreinte après arbitrage gouvernemental – à en accueillir 500 (sans les génisses et les veaux). Au-delà, il faudra retravailler un dossier, repartir en procédure et sans doute mener une nouvelle enquête publique.

On n’en est pas encore là, même si les choses vont vite. Objectif 30 litres par vache et par jour en moyenne, contre 25 litres ces jours-ci, c’est déjà beaucoup mais insuffisant. Le manège géant est capable d’en traire 300 à l’heure trois fois par jour, c’est une cadence proprement industrielle. Déjà plus de 8 000 litres de lait sortent de Drucat chaque jour, Michel Welter en espérant 27 000 avec 1 000 vaches.

Reste ce que nous avons vu. Pas franchement le pire des univers concentrationnaires, mais des conditions d’élevage proprement hors normes. La ferme est immense, presque trois terrains de football. Elle est ouverte au vent (« pour éviter les odeurs »). Les animaux ne sont pas attachés et disposent, ratio établi, de 11 m2 d’espace par tête. Des bâches sont pilotées par une station météo pour les protéger de la pluie ou des vents trop violents. Les bêtes ne verront jamais un brin d’herbe, elles ne danseront jamais pour aller au pré. Vache de vie.

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