Il est 18h30 et non loin de Matignon, une petite foule se forme. Des pancartes émergent : « Mon corps, mes choix, mes droits, mon ministère », ou « Les droits des femmes sont à la rue ». Ce mardi, entre 100 et 200 féministes sont venues manifester contre « la disparition » du ministère des Droits des femmes. Certes, Marisol Touraine a été nommée ministre des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes, mais c'est désormais une secrétaire d'Etat, Pascale Boistard, qui se chargera des droits des femmes. Un véritable camouflet pour les féministes.

« Avoir un ministère de plein exercice pour les droits des femmes pendant tout le mandat était une promesse du candidat Hollande », scande dans un mégaphone Suzy Rojtman, du Collectif national pour les droits des femmes. « Avoir un secrétariat d'Etat dépendant d'un ministère ne nous satisfait pas. C'est une configuration que nous avons déjà eue et qui ne suffit pas à faire avancer les droits des femmes », insiste-t-elle. « On va de régression en régression, les droits des femmes se réduisent à peau de chagrin », déplore Fatima-Ezzahra Benomar des Effrontées. En ces temps de crise économique, où le gouvernement a fait de l'économie sa priorité, Agnès Setton d'Osez le féminisme, a le sentiment que leur combat « repasse au second plan ».

Pascale Boistard, cette inconnue

Un autre changement attise la colère des militantes : le rattachement des Droits des femmes à la Santé. « La question de l'égalité entre les femmes et les hommes n'est pas une maladie. C'est presque un peu humiliant d'être rattaché au ministère de la Santé », tranche Sabine Salmon, présidente de Femmes solidaires.

Et puis, il y a la nomination de Pascale Boistard, nettement moins connue que Najat Vallaud-Belkacem. Si les féministes se défendent de tout procès d'intention, leur inquiétude est perceptible. « C'est une illustre inconnue dans le milieu féministe », ne peut qu'observer Fatima-Ezzahra Benomar. Moins conciliante, Anne-Marie, une militante de 63 ans, lance : « Nommer quelqu'un qu'on ne connaît pas, ça prouve bien qu'on nous mène en bateau ! »

Vers 20h, le rassemblement se dissipe. Les féministes ont bien conscience que leur manifestation ne changera pas la composition du gouvernement. Mais Florence Montreynaud, historienne, l'a rappelé à ses camarades : en 1988, c'est grâce à une pétition féministe que Michèle André avait été nommée secrétaire d’Etat chargée des Droits des femmes dans le gouvernement de Michel Rocard. Alors si ce mardi une fenêtre de Matignon est restée entrouverte, peut-être quelqu'un aura-t-il entendu les plaintes des féministes.