Récit

Un mouvement franc-comtois fondu de la Suisse

Le «Mouvement Franche-Comté» conteste la fusion avec la Bourgogne prévue par la réforme territoriale, et suggère plutôt un rattachement au pays voisin.
par Virginie Ballet
publié le 3 août 2015 à 18h21

«Plutôt suisses que bourguignons.» C'est ce que clame un groupe régionaliste appelé «Mouvement Franche-Comté» (MFC), créé en 2006 et qui suggère que la région soit rattachée à la Suisse voisine. Dans un communiqué, relayé par le Bien public, le groupe dénonce la fusion de la Franche-Comté avec la Bourgogne, prévue par la réforme territoriale. «Compte tenu de la perte par Besançon de son statut de capitale régionale et de la tournure désastreuse prise par les événements quant à l'avenir de la Franche-Comté et à celui de ses habitants, le Mouvement Franche-Comté, qui a pour objet la défense de l'intérêt supérieur de la Franche-Comté et de ses habitants, n'a malheureusement plus d'autre choix que se positionner désormais résolument en faveur d'un rattachement de la Franche-Comté à la Suisse», explique dans le texte le président du MFC, Jean-Philippe Allenbach.

Un tel rattachement permettrait selon lui aux Francs-Comtois de «sauver leur capitale régionale, leur assemblée, leur budget et leur propre drapeau mais, en plus, au lieu de tout perdre comme dans le cas de la fusion avec la Bourgogne, ils seraient alors gagnants sur tous les tableaux, notamment en termes de pouvoir d'achat, d'emplois, d'impôts et de sécurité». Vendredi, à l'issue d'un séminaire gouvernemental, le Premier ministre, Manuel Valls, a en effet annoncé la liste provisoire des capitales des treize futures grandes régions créées par la réforme et qui entreront en vigueur le 1er janvier 2016.

Pour la future région Bourgogne-Franche-Comté, Dijon et ses 152 000 habitants ont été préférés à Besançon (116 000 habitants), au grand regret de Jean-Philippe Allenbach, pour qui ce choix «n'est qu'une des premières conséquences concrètes du projet de fusion avec la Bourgogne dans lequel nous, Francs-Comtois, avons tout à perdre et rien à gagner». Pour l'heure, Besançon devrait conserver le rectorat, tandis que Dijon accueillerait l'Agence régionale de santé, la direction des Affaires culturelles et la chambre régionale des comptes.

L’envie suisse, une vieille marotte

Bourgogne et Franche-Comté avaient fait savoir leur intention de se regrouper dès avril 2014, trois mois après l'annonce de l'intention du gouvernement de redessiner la carte de France. Au cours d'une conférence de presse commune, les présidents socialistes des conseils régionaux de Franche-Comté et de Bourgogne, Marie-Guite Dufay et François Patriat, avaient alors insisté sur la coopération déjà existante entre les deux territoires, notamment au niveau des centres hospitaliers universitaires et des universités. Objectif : «Faire des économies fonctionnelles», et «être plus attractifs en termes de croissance et d'emploi», avaient-ils alors dit. Face aux inquiétudes suscitées par cette union, la Franc-Comtoise Marie-Guite Dufay avait insisté : une «organisation administrative plus efficace pour envisager l'avenir ne veut pas dire une perte d'identité de nos régions. Au contraire, un partenariat très fort pourrait arrêter le départ de certains sièges [d'entreprises et d'organisations] à Dijon».

Pas de quoi apaiser les craintes du Mouvement Franche-Comté, qui, après avoir réclamé un référendum sur cette fusion en novembre, a, aux côtés de deux associations alsaciennes, déposé en mai une requête devant le Conseil d'Etat pour tenter d'abroger cette réforme des régions. L'idée d'une fusion entre la Franche-Comté et la Suisse est par ailleurs une vieille marotte du MFC. Et pour cause : son président, Jean-Philippe Allenbach, sexagénaire retraité de la finance établi à Genève, est né à Besançon d'une mère française et d'un père suisse.

En 2008, son mouvement avait commandé un sondage à un institut suisse pour connaître la position de la population helvète sur une éventuelle union avec les voisins comtois. Résultat : elle s'y déclarait majoritairement favorable. «Tous les Franc-Comtois pourraient trouver leur compte en Suisse : bas salaires multipliés par deux, moins d'impôts, moins de grèves, plein de vélos…», déclarait en 2010 à la Dépêche Jean-Philippe Allenbach, poursuivant : «Les entreprises du Haut-Doubs partent en Suisse. A moins d'instaurer un régime fiscal spécifique à la Franche-Comté, on est morts ! Mieux vaut passer dans le camp adverse.»

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