La chronique littéraire de François Busnel.

La chronique littéraire de François Busnel.

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C'est "LA" révélation de cette rentrée littéraire! Une grenade dégoupillée, lancée à la face du confort et des habitudes, de l'indifférence et de la résignation.

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Qui est Astrid Manfredi? Son éditeur nous apprend sommairement que cette jeune femme tient un blog et signe ici son premier texte, un roman que l'on pourrait prendre pour une confession tant il sonne juste. Mais qu'importe la part autobiographique, nous tenons ici une romancière, une vraie. Style sec, bouillant, direct - comme un coup de poing dans la figure - avec ce trop-plein d'arrogance que seule la jeunesse confère et qui n'a de sens que s'il se métamorphose en littérature.

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En voilà, de la littérature, et de la très belle! Pas la moindre concession, pas l'ombre d'un jugement. Des questions, pas de réponses. Des mots, magnifiquement agencés, pour dire l'engrenage, la solitude, l'absence de remords...

"Petite barbare"

Et les mirages d'une jeunesse passée à l'ombre des tours de banlieue. C'est "la petite barbare" qui vous parle. On la surnomme ainsi pour ne pas avoir à écouter son histoire. C'est pratique, les étiquettes, ça évite de penser. Elle est en prison, la petite barbare, pour complicité de meurtre. Elle n'a pas tué, non, elle a juste fermé les yeux pendant que son gang tabassait à mort un jeune homme dragué à la terrasse d'un café. Ça vous rappelle quelque chose?

Oui, c'est d'après une histoire vraie. Mais qui s'est mis dans la tête de celle qui fut l'hameçon du "gang des Barbares" autrement que pour la juger? Elle raconte. Sa rage de vivre n'excuse rien. Elle le sait. Que veut dire être belle à 20 ans dans une banlieue pourrie, aimer la vie, les talons aiguilles, les robes en strass, bref tout ce qui brille? Et les livres, aussi - elle adore lire, la petite barbare, elle sait lire.

Qui fabrique les monstres? La famille, le milieu social, la société... Trop simple! Du fond de sa prison, la petite barbare attend que sa vie commence enfin. Ce qu'elle a fait, elle l'a accompli de sang-froid. Elle le raconte avec ce même sang-froid, qui dérange et réveille. Magnifique et troublant, ce premier roman en dit beaucoup plus sur la société actuelle que sur la fabrique des barbares, et signe l'entrée en littérature d'une romancière avec laquelle - parions-le - il faudra compter.

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