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Au Kenya, les écoles brûlent et personne ne sait vraiment pourquoi

En trois mois, 113 écoles secondaires ont été partiellement détruites par des incendies volontaires. La société kényane cherche des explications à cette crise nationale.

Le Monde avec AFP

Publié le 29 juillet 2016 à 12h13, modifié le 29 juillet 2016 à 14h27

Temps de Lecture 3 min.

Un pompier kenyan, en avril 2016.

Le Kenya est confronté à une épidémie sans précédent d’incendies volontaires d’écoles publiques, dont les possibles motivations jettent une lumière crue sur le système éducatif du pays le plus développé d’Afrique de l’Est.

En l’espace de trois mois, 113 écoles secondaires, accueillant des élèves âgés entre 13 et 20 ans, ont été partiellement détruites par des incendies volontaires. Représailles d’un « cartel » associé au juteux trafic de sujets d’examens, grogne face à la modification du calendrier scolaire, fronde contre les méthodes autoritaires du ministre de l’Éducation : la société kényane, désemparée, cherche des explications à cette flambée devenue crise nationale.

Parties en fumée

Pour la seule nuit de mercredi à jeudi, cinq écoles sont parties en fumée. Jeudi matin, c’était au tour de la Garbatullah High School située à Isiolo (centre) de connaître le même sort. Quelque 150 élèves ont été arrêtés et inculpés d’incendie criminel ces trois derniers mois, tout comme dix enseignants.

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« Les incendies touchent majoritairement les dortoirs et semblent bien préparés dans la mesure où jusqu’à présent, les élèves n’ont jamais été pris au piège par le feu, ce qui signifie qu’ils avaient vidé les lieux bien en avance, en sachant ce qui allait se passer », peut-on lire dans un rapport confidentiel de la police et du ministère de l’Éducation dont l’AFP a eu connaissance.

La crise des écoles incendiées fait désormais la Une des quotidiens kényans relayant les craintes des parents d’élèves quant à la sécurité de leurs enfants. Jeudi, le journal The Star exhortait en première page le président Uhuru Kenyatta à « mettre un terme à cette folie ».

Fractures ethniques

Des écoles ont brûlé peu ou prou aux quatre coins du Kenya et la crise actuelle se singularise par son caractère national, transcendant les habituelles lignes de fractures ethniques, géographiques ou socio-économiques du pays. Les réunions se sont multipliées ces derniers jours à Nairobi, le ministre de l’Éducation Fred Matiang’i recevant les représentants des enseignants, des leaders religieux, les responsables des enquêtes…

Mais si la prise de conscience du problème est bien réelle - des parents ont même retiré leurs élèves de certaines écoles pour leur sécurité - la société kényane peine à s’expliquer le phénomène. Pour le gouvernement, tout est lié aux récentes mesures drastiques prises pour éliminer la triche aux examens, qui ces dernières années a pris des proportions dramatiques.

En mars 2015, le ministère de l’Éducation a ainsi démantelé le conseil national en charge de l’organisation des examens dont plusieurs ex-responsables ont été inculpés, soupçonnés d’avoir organisé des fuites massives de sujets d’examens moyennant finances. Pour le gouvernement, le « cartel » impliqué dans ces fuites est derrière la vague actuelle d’incendies volontaires.

Le premier mot

La presse kényane avance également le fait que des parents d’élèves auraient déjà payé à l’avance pour des sujets d’examen dont leurs enfants ne verront pas le premier mot, en raison du coup de filet des autorités. Par ailleurs, depuis sa prise de fonctions en novembre 2015, le ministre de l’Éducation Fred Matiang’i a multiplié les réformes, modifiant le calendrier scolaire (qui réduit la durée des vacances), ainsi que la gestion des fonds publics alloués aux fournitures scolaires, froissant ainsi de nombreuses susceptibilités.

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Cette méthode musclée lui a valu le surnom de « Magufuli », en référence au nouveau président tanzanien, John Magufuli, qui s’est illustré par des actions coups de poing dans l’administration de son pays. M. Matiang’i a lui-même opéré plusieurs visites surprises dans des écoles, prenant à partie des professeurs qui ont vécu l’épisode comme une véritable humiliation.

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Et dans plusieurs établissements du pays, les élèves en dernière année (Form Four) ont ces derniers jours refusé de prendre part aux examens blancs, préparatoires à ceux de fin d’année en octobre. Plusieurs élèves ont, sous couvert d’anonymat, expliqué à l’AFP qu’ils souhaitaient un report des examens en raison de retards occasionnés par une grève des enseignants en octobre 2015.

« Un système éducatif où les étudiants incendient les dortoirs et détruisent des écoles chaque jour équivaut à une sérieuse mise en cause de l’esprit collectif de la nation. C’est une honte et cela constitue le reflet d’une société qui s’est détraquée », estimait jeudi le quotidien Daily Nation dans son éditorial.

Le Monde avec AFP

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