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Son invention va bouleverser le cœur de la planète - Le cardiopad d'Arthur Zang

« Au Cameroun, il y a moins  de 50 cardiologues  pour 20 millions d’habitants ! » Arthur Zang créateur du CardioPad 
« Au Cameroun, il y a moins de 50 cardiologues pour 20 millions d’habitants ! » Arthur Zang créateur du CardioPad  © Rolex Awards/Ambroise Tézenas
Par Valentin Holl

Sans argent, il a fabriqué une tablette tactile médicale permettant aux populations éloignées des centres de soins de passer un examen cardiaque. Diminuant ainsi le taux  de mortalité des maladies cardio-vasculaires. A 26 ans,  il ouvre une ­nouvelle ère pour les soins cardiaques dans les pays en voie de développement. Lauréat  des Rolex Awards, il est classé par « Forbes » parmi les dix personnalités qui bâtiront l’Afrique de demain.

Paris Match. Comment vous est venue l’idée de ce projet ?
Arthur Zang. J’étais jeune étudiant en ingénierie informatique à l’Ecole polytechnique de Yaoundé quand j’ai rencontré le Pr Samuel Kingué, éminent cardiologue, qui m’a révélé l’ampleur du problème lié aux maladies cardio-vasculaires dans les pays en voie de développement. Ainsi, au Cameroun, il y a moins de 50 cardiologues pour 20 millions d’habitants ! Si les médecins pouvaient ausculter davantage de patients, cela permettrait déjà d’améliorer la situation. Avec le Pr Kingué, nous avons travaillé pendant un an sur le traitement numérique du signal cardiaque. Puis nous avons écrit des algorithmes capables de traduire les données cardiaques afin d’en extraire les informations utiles au praticien pour effectuer un diagnostic.
Avez-vous immédiatement pensé à créer une tablette ?
Non, mais le Pr Kingué m’a expliqué qu’il avait plus d’une centaine de patients résidant dans des villages éloignés de Yaoundé, sur lesquels il ne pouvait pas effectuer de diagnostic sérieux. Il fallait trouver une solution. L’idée d’une petite tablette est alors apparue. Ne possédant pas les connaissances nécessaires pour concevoir un appareil électronique, j’ai décidé d’apprendre en autodidacte sur Internet. Et sept mois plus tard, j’étais capable de concevoir un appareil.

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Avec des moyens limités, Arthur Zang (debout) a monté sa start-up, Himore.
Avec des moyens limités, Arthur Zang (debout) a monté sa start-up, Himore. ©

Comment avez-vous trouvé le financement pour le prototype ?
J’ai demandé à ma mère infirmière de solliciter un prêt à la banque. J’ai également envoyé mon schéma électronique à Microsoft dans le cadre d’Imagine Cup, ce qui a permis de qualifier mon projet pour la finale régionale. Et, grâce au matériel envoyé par Microsoft, j’ai pu développer un petit OS [Operating System] embarqué pour ma tablette, ainsi que les programmes de collecte et de traitement des données médicales. Le prêt bancaire m’a ensuite permis de rassembler les composants dont j’avais besoin.
Mais comment avez-vous pu entamer une production ?
J’ai enregistré une vidéo sur le fonctionnement de CardioPad, que j’ai postée sur YouTube. Elle a été regardée plus de 30 000 fois en un week-end, la presse en a parlé et le président de la République du Cameroun, Paul Biya, a eu vent de mon invention. Il m’a octroyé une somme de 20 millions de francs CFA [35 000 euros] afin de terminer mes recherches et de fabriquer les premiers appareils. Je suis allé en Chine faire construire les 30 premiers. J’ai ensuite soumis mon projet aux Rolex Awards, et il a été choisi dans la catégorie “Applied technology” parmi 1 800 autres. Avec 30 000 euros, je peux produire 25 à 30 tablettes et les envoyer aux centres névralgiques du pays. Je peux couvrir la totalité du territoire camerounais. Et demain, je l’espère, l’Afrique tout entière.

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Les maladies cardio-vasculaires :première cause de mortalité dans le monde
  17,3 millions : nombre de décès, soit 30 % de la mortalité. Plus de 80 % des décès dans les pays à revenu moyen ou faible, touchant presque à égalité hommes et femmes. D’ici à 2030, près de 23,3 millions de personnes mourront d’une maladie cardio-vasculaire (cardiopathie ou AVC principalement).

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Cardiopade 3
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3 000 $ Le prix du CardioPad : une tablette, un module d’acquisition des données du patient, un boîtier de transmission pour la télémédecine et 7 électrodes accompagnées de leurs câbles de connexion.

L’Afrique, berceau de l’innovation de demain ?
Pas si sûr pour Arthur Zang…
« Nous avons certes beaucoup d’atouts, mais aussi de nombreux freins à l’innovation. Je pense notamment à la corruption et à l’absence d’investissements dans le domaine scientifique. Tant qu’on ne comprendra pas qu’être chercheur est un boulot à plein temps et que la recherche est un domaine nécessaire et non pas optionnel, le continent africain ne se développera pas. Si chercheurs et hommes politiques ne parviennent pas à s’accorder sur ce sujet, la croissance sera factice. »

Cardiopad
©

1. Pour effectuer un examen, les électrodes sont placées sur le patient, puis reliées à un petit module d’acquisition du signal cardiaque qui va capter la résonance des électrodes et l’envoyer à la tablette via Bluetooth.
2. Grâce à son logiciel, la tablette va ensuite traiter les données et les sauvegarder sous la forme d’un fichier référencé dans un serveur national consultable par les cardiologues affiliés.
3. Le médecin interprète l’examen et délivre son diagnostic qui est renvoyé au serveur national. Le résultat et les prescriptions éventuelles sont téléchargés du centre vers le CardioPad de l’infirmière qui les communique au malade.

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