Menu
Libération
TRIBUNE

Vaccins obligatoires, un geste politique autoritariste au profit des laboratoires

Après la polémique créée par l’augmentation du nombre de vaccins obligatoires, la ministre de la Santé envisage une «clause d’exemption» pour les parents réticents. Car la méfiance est grande face aux effets indésirables. Des parents appellent les pouvoirs publics à plus de transparence et d’indépendance à l’égard des firmes pharmaceutiques.
par un collectif, d'enfants en bas âge
publié le 9 juillet 2017 à 17h16

Madame la Ministre,

Non, nous ne sommes ni inconscients ni mal informés. Non, il ne suffira pas de faire auprès de nous de la «pédagogie». Car nous savons que les vaccins ont permis de faire disparaître des épidémies invalidantes, voire mortelles. Nous sommes convaincus de l’importance de faire vacciner massivement les populations. Nous savons aussi que si une part significative de la population cesse de se faire vacciner, des épidémies, jusqu’ici disparues, referont surface. Ce n’est donc pas par ignorance que nous sommes en France des millions de parents, de médecins et de professionnels à nous opposer à votre projet d’élargir l’obligation vaccinale chez les nourrissons et les jeunes enfants de trois à onze - c’est-à-dire à l’ensemble des vaccins recommandés en 2017. Selon une enquête rendue publique en septembre 2016, près d’un Français sur deux se méfie de leurs effets secondaires, avançant des raisons qu’il serait honnête de ne pas réduire à une peur irrationnelle véhiculée par les lobbys antiscientifiques et antivaccinaux.

On appelle cela le «rapport bénéfices-risques». Quand vous avez des nourrissons et que vous les amenez chez votre pédiatre, il vous explique qu’il faut faire tous les vaccins recommandés par les autorités sanitaires, dans la mesure où le rapport bénéfices-risques de la vaccination recommandée est positif. Entendez par là que, s’il est officiellement reconnu que les vaccins présentent des risques pour la santé, le bénéfice lié à la protection des populations est supérieur au risque présenté pour l’organisme humain. Le problème est que, si ledit bénéfice est connu, communiqué, et expliqué, les risques restent très mal connus. Et ce à plusieurs niveaux.

D’abord au niveau de la pharmacovigilance : les autorités en charge de la santé publique restent silencieuses et sans réaction face aux cas d’effets secondaires graves relevés dans le cadre du recensement des accidents vaccinaux, pourtant sous-estimés en raison d’une participation minoritaire des pédiatres et médecins généralistes aux notifications vaccinales.

Ensuite au niveau de la recherche, à laquelle il appartiendrait justement de rechercher plus systématiquement, et sur le long terme, les liens éventuels entre les symptômes présentés par les malades concernés et certains vaccins en étudiant les effets des adjuvants (dont l’aluminium) et des vaccins polyvalents, ainsi que les effets de la multiplication des administrations de vaccins, chez le nourrisson et le très jeune enfant dont le système immunitaire n’est pas encore mature, etc. Or, cette recherche est pour le moins peu encouragée, quand elle n’est pas menacée - on lira avec profit sur ce point le témoignage du professeur Romain Gherardi.

Dans ce contexte de sous-information, on aura beau jeu d’expliquer aux parents «mal informés» que seuls existent quelques très rares cas d’effets secondaires liés aux vaccins, et que leurs bénéfices sont supérieurs aux risques qu’ils font courir aux personnes vaccinées. Encore faudrait-il reconnaître le peu de données dont on dispose pour véhiculer de telles «informations».

Non, la «méfiance» des Français (médecins généralistes compris) n'est pas le fruit de la «désinformation» comme l'explique, avec condescendance, le professeur Alain Fischer, président de la Concertation citoyenne sur la vaccination mise en place en 2016 par l'ex-ministre de la Santé. Elle est liée à un soupçon grandissant - et loin d'être seulement français - quant à l'ampleur des effets indésirables liés aux nouveaux vaccins plurivalents, du fait des adjuvants entrant dans leur composition. Et ce soupçon est nourri par l'inertie des pouvoirs publics, qui se refusent de façon incompréhensible à y répondre par une pharmacovigilance accrue, relayée par des recherches indépendantes de tout intérêt industriel, ainsi que par l'application d'un principe de précaution pour le moins justifié par le climat de méfiance généralisée. Au lieu de cela, quelle est la réponse politique envisagée ? Une obligation vaccinale élargie, qui revient à tenter d'éradiquer une crise de confiance par un geste politique autoritariste. Pour les parents réticents ou méfiants, cela équivaudrait à être forcé de prendre sur la santé de leurs enfants un risque dont ils seraient empêchés de mesurer la nature exacte. C'est tout simplement scandaleux.

Le 29 juin, dans les colonnes du Parisien, 200 grands médecins prenaient collectivement la parole pour soutenir la ministre de la Santé dans son projet. Ils parlaient à son propos de «courage politique» ! Mais quel courage y a-t-il à user de la force pour contraindre le peuple sans lui accorder les lumières ? Le vrai courage ne consisterait-il pas plutôt à poser des limites à un pouvoir industriel et financier, qui agit et s'exprime en toute impunité ?

«Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre un seul dollar de business», écrivait en 1970 dans un document interne la firme américaine Monsanto à ses commerciaux, pour leur donner des «éléments de langage» face aux arguments de ceux qui dénonçaient alors à juste titre les effets cancérigènes du PCB. Une phrase impressionnante, qui rappelle à celles et ceux qui veulent à tout prix occuper la place du politique - donc, en principe, de la défense de l'intérêt commun - que la motivation des industriels de la pharmacie et de la chimie (fabricants de vaccins à l'aluminium comme les autres) est bien moins la santé des populations que l'augmentation des profits de leurs actionnaires.

Mettre des limites aux grandes firmes pharmaceutiques serait-il devenu impossible ? Sinon, comment expliquer qu’une ministre de la Santé préfère rendre obligatoires les vaccins commercialisés par lesdites firmes plutôt que de leur imposer de commercialiser ceux qui sont obligatoires (le vaccin DTPolio, indisponible depuis 2008) ? Comment expliquer qu’elle se refuse à leur demander de réétudier la composition de ceux soupçonnés de présenter des risques pour la santé humaine ? La dépendance des pouvoirs publics envers les intérêts macroéconomiques est-elle si forte qu’au projet politique légitime d’une pharmacovigilance accrue et rigoureuse ainsi que d’une recherche de pointe sur les effets des nouveaux vaccins, il faille préférer le mépris et l’abandon des victimes de maladies d’origine vaccinale, et la mise à l’écart des quelques chercheurs courageux qui osent poursuivre la voie que leur indique la science ?

Madame la ministre, le véritable courage politique n’est pas de mépriser les voix citoyennes exprimant leur méfiance envers certaines formes de ces produits évidemment essentiels que sont les vaccins. Il n’est pas non plus de faire croire à ceux qui s’opposent à l’obligation vaccinale élargie, pour désamorcer leur opposition, qu’on envisagerait une clause d’exemption à leur égard. Il consiste plutôt à renforcer la recherche, la transparence et à poser des limites aux intérêts privés.

Séverine et Christophe Angebault-Rousset, Miguel Benasayag, François Cam, Bastien Cany, Angélique Del Rey, Géraldine Gaudefroy-Demomby.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique