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Du Darfour à Paris, le périple de deux migrants soudanais

Après un an de voyage, deux Soudanais arrivent gare de Lyon. Une journaliste du « Monde », témoin de la scène, raconte leurs premiers pas en France.

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Publié le 20 septembre 2017 à 06h00, modifié le 21 septembre 2017 à 15h37

Temps de Lecture 8 min.

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Mohammed ­Al-Douma à Dijon, où il vit aujourd’hui, le 14 septembre.

A peine descendue du wagon, j’ai croisé le regard inquiet de mon fils. « Tu as vu l’homme, dans le train ? Il a l’air désespéré, on dirait qu’il va pleurer. » Je n’ai rien vu, j’ignore de qui il parle. « Il y avait un migrant africain dans le TGV, le contrôleur lui disait “Police, police !”, il n’osait pas sortir, il paraissait terrorisé », ajoute mon compagnon.

En ce dimanche de fin d’été, la gare de Lyon est envahie par des voyageurs encombrés de valises et de poussettes, mais en quelques minutes, le quai est désert. Le migrant est là – debout, seul, immobile. « Do you need help ? » Tout en surveillant des yeux les alentours, il confie être originaire du Soudan. Il est monté dans le TGV près de Marseille, il a 17 ans.

Bientôt, un deuxième migrant s’approche. Il parle un peu mieux anglais, il a 23 ans. Ils ont voyagé ensemble depuis le Darfour, dans l’ouest du pays. « Vous êtes partis il y a longtemps ? » « Un an et demi, début 2016. » Au beau milieu de cette ambiance de fin de vacances, les images des reportages sur les migrants me reviennent : la traversée du Niger, les violences de la police libyenne, les chavirages de bateaux en Méditerranée.

Tous deux sont vêtus d’un simple tee-shirt, d’un bermuda et d’une paire de baskets – pas un sac, pas une valise, pas même un pull. « Vous n’avez pas de bagages ? » « Plus rien depuis la Libye, ils nous ont tout pris. » Le plus âgé sort de sa poche un papier froissé qu’il déplie lentement : une liste de noms et de numéros de téléphone portable. Il connaît un homme parti du Darfour plus d’un an avant eux : s’il a survécu, il est peut-être à Paris.

La ville devant soi

Je l’appelle : il vit à la Défense, il se réjouit d’avoir des nouvelles de ses amis. Une longue conversation en arabe commence sur le quai. Les voyageurs sont partis, les femmes de ménage passent dans les wagons vides, les haut-parleurs annoncent les prochains départs. Rendez-vous est pris avec leur ami à la station de métro La Chapelle, dans le nord de Paris. Je propose de les y accompagner depuis la gare. « Welcome in France. » Pour la première fois, ils sourient.

« Je me sens tranquille, en sécurité, heureux. J’ai prévenu ma famille, au Soudan, ils savent que je suis bien arrivé »

Il faut remonter le quai, traverser la foule des voyageurs en attente, plonger dans les couloirs du métro. Ils sont inquiets. « Ici, il n’y a pas de police, n’ayez pas peur. » Ils n’ont pas de tickets, ils ne savent pas lire le français. Devant les tourniquets, je leur montre comment glisser le ticket dans la fente, comment le récupérer sur la machine, comment pousser les portillons. Ils découvrent les affiches publicitaires, le métro automatique de la ligne 1 et ses portes coulissantes, la foule pressée du Paris souterrain.

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