LE COURRIER AMOUREUX DE MADAME CHOSE

Sale divorce

Bonjour Madame Chose,

J’ai 47 ans et je me suis séparée il y a 9 ans. J’étais avec mon conjoint depuis 20 ans et nous avons deux enfants, un garçon et une fille qui avaient 16 et 13 ans au moment de notre rupture. Mon problème, c’est que mon garçon a cessé tout contact avec moi depuis la séparation. Ma fille, elle, me reparle, mais ç’a été difficile. Ma séparation n’a pas été facile : mon ex est un homme jaloux et possessif. Il n’a jamais digéré le fait que je l’aie quitté... et après neuf ans, il ne le prend pas encore.

Je m’ennuie de mon garçon, il est resté avec son père durant toute ces années et depuis un mois, il est déménagé dans la région de Québec avec sa blonde, que j’aimerais connaître. Je voudrais tellement partager leur vie. J’ai tenté des rapprochements avec lui à plusieurs reprises. Je lui envoie des courriels régulièrement mais sans retour, chaque fois. Il me renie vraiment. Je ne sais plus quoi faire. Il me manque et il y a un vide dans ma vie depuis neuf ans déjà.

De mon côté, j’ai un conjoint formidable que j’adore et je suis heureuse. Je me console avec la belle relation que je vis avec lui. Que feriez-vous à ma place ? J’ai consulté et il me semble que j’ai tout fait pour renouer avec mon fils. J’ai même tenté de parler à mon ex à ce sujet. Mais jamais il ne dira à mon gars de venir me voir. Il pense que je suis une mauvaise mère. 

— Une maman qui rêve du jour où elle pourra serrer son garçon dans ses bras à nouveau

Chère maman moderne, 

Mettons tout de suite quelque chose au clair, j’ignore la raison véritable pour laquelle votre fils a coupé les ponts avec vous. Je veux dire, vous écrivez que c’est des suites de votre séparation que le garçon a décidé de vous mettre de côté. Et j’en conclus que vous avez une relation harmonieuse avec votre fille, mais que ç’a été difficile aussi sur ce front. Je demande parce que j’ai de la misère à vous suivre. J’ai l’impression que vous me cachez des affaires. Je veux dire, est-ce qu’un fils arrête de parler à sa mère parce qu’elle a laissé son père ? J’en doute. Ça peut faire un temps quand on a 15 ou 16 ans, mais ça ne dure pas, le lavage de cerveau. À un moment donné, on en revient. 

J’avais 14 ans quand mes parents se sont séparés. Comme votre fils, c’est ma mère qui a laissé mon père. Au début, j’étais pas mal fâchée contre elle. Surtout que mon père n’arrêtait pas de me parler dans son dos. Mais ça a passé. Je comprenais pourquoi elle avait divorcé. Pis même si ça me faisait royalement suer, j’étais de son bord sur ce coup-là. 

Je vais vous faire une confidence : mon père a pas mal de défauts. Mais le plus grand d’entre eux, c’est de ne pas reconnaître qu’il en a. Je ne laverai pas mon linge sale dans le journal, mais disons simplement que c’est contre mon père que je suis fâchée, maintenant. 

Certains pourraient dire que, comme votre fils, je ne suis pas encore revenue du divorce de mes parents. Ce n’est pas le cas. Divorcer, c’était pas mal la meilleure affaire que mes parents pouvaient faire pour moi. C’est tout ce qui a suivi après dont j’aurais pu me passer. Ça vous dit quelque chose, maman moderne ? Vous savez toutes les saloperies que les « ex » se font pour se prouver qu’il y en a un des deux qui est plus à blâmer que l’autre. Je sais que vous savez de quoi je parle. Sinon, vous ne m’auriez pas écrit. 

Une amie m’a dit la semaine passée que les enfants sont souvent bien ingrats. Elle a raison : on veut toujours que nos parents soient parfaits. Et on peine à leur pardonner les blessures qu’ils nous infligent parce qu’ils sont eux-mêmes de grands poqués. Pourtant, on devrait être capables de ne pas leur en vouloir pour ça, qu’elle dit. Moi, j’essaie très fort, mais on dirait que je n’y parviens pas. Faut dire que je suis un enfant-roi pis qu’on est ben rancuniers. Ils devraient ouvrir des centres de thérapie longue durée pour les enfants-rois pis leurs parents. Me semble qu’on serait bien. 

Voyez, je suis un peu comme votre fils, maman moderne. Ça fait que c’est bien difficile pour moi de vous aider. Je comprends votre tristesse, bien entendu, mais je me sens plus près de celle de votre fils. Je suis désolée pour ça. 

Mon conseil : fichez-lui la paix, à votre fils. Un jour, peut-être, il vous reviendra.

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