Akiyuki Nosaka, l'auteur de "La Tombe des lucioles", est mort

Si le nom d’Akiyuki Nosaka est connu du grand public, c’est avant tout pour Le Tombeau des lucioles  adaptation par le studio Ghibli de sa nouvelle autobiographique La Tombe des lucioles , où l’écrivain raconte sa terrible enfance : confié à une famille adoptive peu après sa naissance le 10 octobre 1930, sa mère de substitution meurt sous les bombes pendant l’été 1945. Akiyuki Nosaka erre alors dans les décombres avec sa petite soeur, qui décède à son tour de malnutrition.

Pour survivre, le jeune homme vole de quoi se sustenter, vend le fruit de ses larcins au marché noir, avant d’être arrêté et envoyé en maison de correction. Il y est retrouvé par son père, qui l’envoie suivre des études de littérature à Tokyo, sans succès. Akiyuki Nosaka est un indomptable, qui s’est habitué à une vie décousue. Il quitte l’école et exerce de nombreux petits boulots (allant jusqu’à vendre son sang), avant d’écrire son premier livre en 1963, Les Pornographes . Ce premier roman, qui a fait scandale, prend le contre-pied du miracle économique japonais post-seconde guerre mondiale en racontant les aventures de deux amis qui, dans les années 60, se lancent dans le business florissant de la pornographie. Fresque satirique et insolente du Japon moderne, ce roman vaut à Akiyuki Nosaka un succès immédiat. Le livre est adapté au cinéma en 1966 par Imamura Shohei, le grand réalisateur de La Ballade de Narayama .

En parallèle de son activité d’écrivain, Akiyuki Nosaka enchaîne les métiers. Il est tout à tour journaliste, scénariste, entraîneur d’un club de rugby, boxeur, chanteur de variété (Omocha no Chachacha  est un succès auprès des jeunes japonais) et même, le temps de quelques mois, sénateur. A l’étranger, c’est pour son oeuvre littéraire qu’il reste connu. Fruit de la culpabilité du survivant, La Tombe des lucioles  paraît en 1967. Le livre autobiographique retraçant son enfance, récit difficile au ton simple, presque cru, est un grand succès critique, récompensé du prestigieux prix Naoki. En 1988, il est adapté par Isao Takahata, co-créateur des studios Ghibli avec Hayao Miyazaki, en film d’animation, au ton plus léger que la nouvelle éponyme.

L’horreur de la guerre, la thématique de la mort, la souffrance accompagnent l’oeuvre de Nosaka. Le Dessin au sable et l'apparition vengeresse qui mit fin au sortilège, Contes de Guerre, Le Moine-cigale, La Vigne des morts sur le col des Dieux décharnés ou Les Embaumeurs  racontent ainsi un Japon balafré par la guerre.

« Il y a du Mishima chez lui, et du Gainsbourg aussi  » disait Caroline Broué  d’Akiyuki Nosaka  à qui elle avait consacré un Surpris par nuit  en 2001 sur France Culture. Un écrivain qui a toujours voulu piquer la chair de son époque et de son pays, le Japon. De cet homme, à la fois sérieux et contestataire, de ses engagements politiques, de son goût pour la photographie, de ses croyances animistes et de ses démêlées avec l’extrême droite japonaise, il sera question. Tout comme de l’alcool, des geishas… et bien sûr de sa littérature tragique, comique, provocatrice et follement triste. Ecoutez :

Le jour de la parution de "La Tombe des lucioles" en 1988 en France, Akiyuki Nosaka avec le traducteur Patrick De Vos et l'éditeur Philippe Picquier.