Natasha Parry, comédienne et compagne de Peter Brook, est décédée

Elle avait été Winnie, à moitié enterrée dans “Oh les beaux jours” de Beckett, et Lioubov, dans “La Cerisaie” de Tchekhov. En 2009 encore, elle déclamait encore des sonnets de Shakespeare dans sa langue natale au Bouffes du Nord. Elle s'est éteinte à 84 ans.

Par Fabienne Pascaud

Publié le 24 juillet 2015 à 17h16

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 05h46

Cétait une actrice frémissante, pleine de légèreté et de fragilité. D’humour et de sensibilité. D’une incroyable féminité. De celle qu’on ne voit plus guère. De celle des grandes actrices anglo-saxonnes du temps jadis… L’anglaise Natasha Parry, fille d’une mère russe et d’un père gréco-britannique, s’est éteinte après un AVC le 22 juillet à l’âge de 84 ans.

Le plus beau souvenir qu’on ait gardé d’elle est peut-être dans cette Cerisaie de Tchekhov aux Bouffes du Nord, en 1982, où l’avait mise en scène son époux et long compagnon de théâtre Peter Brook. Avec un léger et charmant accent anglais, elle y incarnait Lioubov, la femme-oiseau irresponsable, à jamais blessée par la noyade de son fils, victime d’un amant peu scrupuleux, et aussi inconsciente que son frère (Michel Piccoli) de la ruine programmée de leur domaine. Elle y était d’une grâce frivole, désespérée et délicieuse. Comme dans Oh les Beaux jours de Samuel Beckett où la dirigea une fois encore Peter Brook aux Bouffes du Nord en 1995 ; où avec une coquetterie un peu folle, elle était Winnie, la femme enterrée dans un mamelon de terre et qui s’y enfonce.

Partenaire de Marcello Mastroianni dans “Tchin-Tchin”, de François Billetdoux

On n’a pas vu assez au théâtre celle qui fut aussi la partenaire de Gérard Philipe dans Monsieur Ripois de René Clément en 1954. Est-ce parce qu’elle préférait jouer en langue anglaise, elle qui commença le métier dès l’âge de 12 ans avec Michael Redgrave et John Gielgud ? On la revoit encore disant aux Bouffes du Nord les Sonnets de Shakespeare (2009) ou plus loin, beaucoup plus loin, incarnant avec fantaisie et tendresse la partenaire de Marcello Mastroianni dans Tchin-Tchin, de François Billetdoux, au théâtre Montparnasse, en 1984.

Sa fille Irina Brook, actuelle directrice du Centre dramatique de Nice et metteuse en scène, raconte qu’aller voir sa mère au théâtre l’a toujours fait pleurer, étant enfant. Elle se souvient de ses rôles tragiques, si émouvants. Quand on évoque avec elle la douceur, aussi, de ces yeux noirs qui savaient être durs, elle parle au contraire de la force extraordinaire qu’aura eu sa mère sa vie durant… C’est Irina qui lui a fermé les yeux. Elle souriait comme une princesse de conte de fées, dit-elle. Et elle sera inhumée dans le village où la famille Brook vécut longtemps, à Jouars, dans les Yvelines, le lundi 3 août, après la messe de 11 heures.

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