Décès du réalisateur Jacques Rouffio

Scénariste, producteur et réalisateur, il avait fait jouer Romy Schneider pour la dernière fois dans 'La Passante du Sans-souci'. Il s'est éteint à 87 ans.

Par Pierre Murat

Publié le 09 juillet 2016 à 10h57

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 02h52

Il appartenait à une époque où l'on ne devenait pas cinéaste parce qu'on en avait envie. Il fallait faire ses preuves. Jacques Rouffio en donna pendant dix ans, en devenant, au début des années 50, l'assistant de quelques grandes gueules (Jean-Pierre Mocky avec Les Dragueurs et Les Vierges). Mais aussi de cinéastes nettement mois doués que lui, Bernard Borderie (Le Gorille vous salue bien, Comment qu'elle est), ou, pire encore l'ineffable Robert Thomas (l'auteur de la pièce 8 femmes), devenu, nul ne sait pourquoi, metteur en scène de cinéma : le catastrophique La Bonne Soupe, avec Marie Bell, Annie Girardot et Sacha Distel…

Son premier essai, en 1967, - il a presque 40 ans – est un coup de maître. Insolent, qui plus est : L'Horizon, c'est la rencontre, durant la Première Guerre mondiale, d'un soldat blessé (Jacques Perrin) et d'une jeune veuve anti-militariste (Macha Méril) qui le pousse a déserter. Difficile de monter financièrement un tel film. Difficile de le faire sortir dans les salles. Son succès (relatif) permet, néanmoins, à Jacques Rouffio de s'attaquer à 7 morts sur ordonnance, autre sujet délicat : l'histoire (vraie) du suicide de deux médecins, à dix ans de distance, dans la même ville de province… Mené comme un thriller, le film impose une morale féroce : dans un monde désormais sans foi ni loi, les innocents ne savent que perdre et les coupables, surtout si ce sont des notables, ne peuvent que l'emporter. Face à des acteurs solides (Michel Piccoli, Marina Vlady, Michel Auclair), on assiste à l'affrontement génial de deux comédiens que les années séparent, mais le talent rapproche : le tout jeune Gérard Depardieu, nerveux et secrètement fragile face Charles Vanel, madré et indestructible…

Dernière réussite, en 1978 : Le Sucre. Toujours sur un scénario de Georges Conchon, Rouffio y décrit la burlesque et effrayante naissance d'une bulle spéculative autour du prix du sucre… Une fois encore, c'est du vitriol. Et une fois encore, les acteurs se régalent : Jean Carmet, Michel Piccoli et Depardieu, cette fois dans le rôle inattendu d'un vicomte, nommé Raoul-Renaud d'Homecourt de la Vibraye… Succès public et nominations aux César (curieusement, Jean Carmet le sera comme meilleur acteur ET meilleur second rôle : forcément, il ratera les deux…). Mais étrangement, la carrière de Jacques Rouffio stagne.

La Passante du Sans-souci (le dernier film de Romy Schneider qu'elle avait prié Rouffio de réaliser) est un mélo un rien convenu. Un peu plus tard, ni Mon beau-frère a tué ma sœur (1986), ni L’État de grâce (1987), ni L'Orchestre rouge (1989) ne convainquent vraiment.

C'est à la télévision que Rouffio travaille, alors: il réalise, notamment un film sur Jules Ferry, en 1993. Et une adaptation de Miss Harriett de Maupassant, en 2007. Il est mort le 8 juillet à l'âge de 87 ans.

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